Alexandre Léger auteur rétro

Tout l’univers- Littérature française

Aujourd’hui: « Fasciste » de Thierry Marignac (1988)

Le parcours de Rémi Fontevrault, jeune homme de la meilleure société au sein d’un parti d’extrême-droite.

Publié en 1988, « Fasciste » fit son effet au point de valoir à son auteur de grandes difficultés dans l’édition de ses livres. Le titre, il faut le dire, annonçait la couleur et pose un problème en soi. D’ordre sémantique. Le parti dans lequel milite le héros qui n’est jamais nommé mais dont l’identité est évidente (De même que son chef désigné ici comme « L’ogre ») n’est pas fasciste, quant au terme d’extrême-droite, il n’est guère plus approprié. Certes je l’ai employé moi-même dans le résumé ci-dessus, mais l’un des inconvénients dans ce cas de figure est qu’il est bien difficile de bien dire ce qui est déjà mal défini au départ. Comment s’en tirer alors? En brandissant des tartes à la crème type « Droite radicale »?

Le meilleur moyen d’éviter ces chausses-trappes du langage est encore de s’attacher à la réalité que cachent ces fantaisies lexicales. Si le livre de Thierry Marignac n’a pas exactement de vocation sociologique, il permet de comprendre l’engouement pour un certain discours. Il y a à cela une raison évidente: l’échec du « vivre-ensemble » et ses conséquences. Et, de ce point de vue, rien n’a changé depuis, les gouvernements qui se sont succédé ayant tous en commun de persister à ne pas agir. Toutefois si le roman évoque ce problème, il ne verse pas dans la sociologie. Le thème central c’est plutôt le vide existentiel de Rémi, entre romantisme et besoin d’exprimer son surplus de testostérone. Les aînés des soixante-huitards disaient des lanceurs de pavé qu’il leur fallait une bonne guerre, Rémi n’est pas loin de penser la même chose à son endroit Aussi, il s’engage dans la voie d’un militantisme musclé. Chaque chapitre décrit les étapes de ce chemin à la vérité douloureux tant moralement que physiquement. C’est l’occasion pour l’auteur de décrire le monde interlope des salles de boxe plus ou moins clandestines aux allures d’antichambre des enfers. Le tableau que Marignac en brosse est d’autant plus saisissant qu’il en est un fin connaisseur, étant lui-même un pratiquant du noble art. Cela ouvre du reste une perspective intéressante quant aux rapports des jeunes hommes à leur virilité, toujours actuelle d’ailleurs, et problématique depuis un temps précédant de beaucoup celui du livre de Marignac. Déjà, Roger Nimier dans « Les épées » (Par ailleurs chroniqué dans ces pages) parlait d’une « peureuse jeunesse ». Et c’était dans les années 50. C’est – et bien que cela ne soit pas clairement exprimé- ce à quoi veut échapper Rémi.

Une autre des qualités de « Fasciste » est de planter judicieusement son contexte. Il démarre avec les grèves étudiantes de 1983 continue avec les liens entre les liens du camp national français avec les loyalistes d’Ulster etc. Pour finir, l’auteur a l’intelligence de laisser le lecteur se orger sa propre opinion. Pas de condamnation, pas d’exaltation non plus. Simplement ce qui pourrait s’appeler – pour détourner un film célèbre- une histoire de violence dont chacun pensera ce qu’il voudra.


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